Cette plante est une des plus rustiques, et une de celles qui s'élèvent le plus facilement : elle croit dans les champs comme dans les jardins, et réussit dans toutes sortes de climats, pourvu que le fonds de terre soit un peu frais.
Sa racine est en partie droite et en partie rampante, et garnie de beaucoup de fibres. Sa tige s'élève à deux pieds (64 cm) communément, et plus quand elle est en bon fonds : elle est quadrangulaire, cannelée et creuse, fournie de feuilles dans toute sa longueur, placées sans symétrie, et divisées en trois, cinq ou sept parties, séparées par une côte à laquelle elles sont attachées. Ses feuilles sont oblongues, arrondies, épaisses, bleuâtres et lisses ; ses fleurs naissent plusieurs ensemble des aisselles des côtes sur un même pédicule, rangées par ordre du même côté : elles sont légumineuses et blanches, panachées de veines purpurines et pourpres à la base. Les feuilles latérales sont noires au milieu, et blanches sur les bords ; la feuille intérieure est verdâtre; le calice est vert, partagé en cinq quartiers, d'où il sort un pistil qui se change ensuite par degrés en une gousse longue, épaisse presque ronde, charnue et velue, remplie de graines ou de fèves, au nombre de trois quatre ou cinq : ces graines étant jeunes sont d'un blanc verdâtre, de forme ovale un peu carrées larges aplaties, et enveloppées d'une écorce dure et épaisse qu'on nomme la robe, ayant une marque longue et noire à l'endroit où elles tenaient à la gousse. Étant sèches, elles deviennent rousses, et la substance intérieure devient dure et solide. À mesure que la graine sèche, la gousse et la plante se dessèchent aussi, et tout vient noir. Chaque pied produit jusqu'à quinze gousses quand le fonds et l'année sont favorables, d'autant plus que le même pied produit souvent deux et trois tiges.
Les manières dont on l'apprête sont assez connues : on la mange au beurre, ou au lard, ou à la crème ; dans la nouveauté, elle fait un plat d'entre-mets, dont les gens friands et délicats sont fort empressés. Pour cet apprêt on prend la fève de marais dans le temps qu'elle est très petite, c'est-à-dire, de la grosseur d'une grosse fève de haricot, ou un peu plus : on ne lui ôte que le bout du germe avec l'ongle pour l’accommoder. Le peuple s'accommode mieux des fèves de marais quand elles sont plus grosses, on les dérobe alors, pour me servir du terme usité ; on les fait cuire avec un peu d'eau' après les avoir fait roussir légèrement dans le beurre ; on y met ensuite du poivre et du sel, avec une pincée de sarriette, dont le goût relève celui de la fève de marais, qui est un peu fade de sa nature. Elle a encore le défaut d'être pesante et venteuse, et de resserrer beaucoup : on ne doit pas trop en manger, quand on n'a pas l'estomac à toute épreuve.
Ce légume a des propriétés pour la médecine ; sa farine est une des quatre résolutives qu'on emploie fort communément dans les cataplasme pour amollir, résoudre et disposer les tumeurs à suppurer ; dans les cours de ventre, lorsqu'il est permis de les arrêter, la bouillie faite avec cette farine et du lait, est un bon remède. La cendre des tiges et des gousses de cette plante brûlée, est apéritive : on en fait bouillir une once (30 g) dans une pinte d'eau (0,9 l), qu'on fait filtrer ensuite et boire aux hydropiques. L'écorce et la pousse de ce grain, qu'on fait infuser du matin eau soir dans un verre de vin blanc au poids de trois gros, est un remède presque infaillible pour les rétentions d'urine. L'eau distillée des fleurs est un excellent cosmétique pour faire passer les taches et les rousseurs du visage.
On cultive dans ce pays cinq différentes espèces de fèves savoir : la grosse espèce, la julienne, la picarde, et deux sortes de petites qu 'on appelle féveroles : ces deux dernières ne sont bonnes que pour les chevaux, et ne se sèment que dans les champs. Je n'en dirai pas davantage.
Des trois autres espèces, la grosse est celle qui est la meilleure, et à laquelle on doit s'attacher pour son usage particulier ; les deux autres sont beaucoup plus petites, et ont le goût plus sauvage : on ne s'en sert qu'au défaut de la première, et elles ne sont mangées que par le peuple qui s'accommode de tout. On en cultive peu aux environs de Paris quoiqu'il s'en consomme autant que de l'autre ; on les apporte des pays écartés, par préférence à la grosse espèce parce qu'étant plus dures, elles résistent mieux à la voiture et que d'ailleurs la semence en est beaucoup moins chère pour ceux qui en font trafic.
La grosse espèce se sème dans les mois de décembre et de février ; on en risque un peu dans cette première saison. Lorsqu'elles peuvent se conserver, elles sont de quinze jours plus hâtives que celles de la seconde semence ; mais elles périssent souvent : les mulots, les pies et les corneilles les mangent, ou les gelées les détruisent, à moins qu'elles ne soient bien abritées, et soigneusement couvertes dans les temps de neige et de gelée. Il est donc à propos de remettre au mois de février la plus forte semence.
On les sème en planche ou en plein carré, par rayons ou par touffes ; cette dernière façon est la meilleure parce qu'on les serfouit plus facilement ; trois suffisent dans chaque touffe, qu'on espace d'un pied (30 cm) ou de quinze pouces (40 cm). On les serfouit au mois de mars ou d'avril, suivant leur force : on les chausse un peu en même temps ; on les laisse croître sans prendre d'autre précaution.
Elles fleurissent en mai, et on les arrête alors, c'est-à-dire on pince les bouts des tiges : la fleur arrête mieux les gousses en viennent plus belles et le puceron qui est leur ennemi, s'y attache beaucoup moins, quand cette partie qui est la plus tendre, est supprimée. Si cette vermine les a déjà gagnées il faut ramasser dans des paniers ces bouts de tiges qui en sont infectés, et les jeter loin ou les enterrer.
Avant que de les semer, beaucoup de personnes, esclaves des anciennes pratiques, les font tremper, soit dans de l'eau naturelle, soit dans de l'eau de fumier, dans l'opinion que cela les fait plus tôt germer et lever ; pour moi qui en ai fait l'expérience pour ma règle, le seul effet que j'en aie aperçu, c'est qu'après les avoir ainsi trempées, il en pourrissait beaucoup en terre qui ne levaient pas, et que les autres n'avançaient pas davantage : chacun pourra l'éprouver.
On doit choisir la meilleure terre qu'on ait pour placer ce légume qui ne s'accommode point des terres légères ; et mieux la terre a été fumée et labourée, plus il rapporte.
Les premières semées commencent à donner à la fin de mai leur fruit, qui n'est désiré par les gens délicats qu'autant qu'il est petit : ainsi on doit le saisir dans ce moment, et les gousses qui succèdent les unes aux autres, fournissent trois semaines environ.
On peut continuer d'en semer jusqu'à la fin d'avril ; mais, passé ce mois, la fleur qui arrive dans les grandes chaleurs, est sujette à couler ; le puceron s'y joint et les ruine. Ce qu'on peut faire sans frais aux risques de l'événement, c'est de couper au mois de mai ou de juin, à fleur de terre, les premiers pieds qui ont rapporté ; il repousse de nouvelles tiges, qui donnent du fruit en août et en septembre si l'insecte ennemi ne s'y attache pas.
On réserve pour graine la quantité dont on a besoin et on arrache les pieds quand la gousse et le cossat sont noirs et secs ; on les bat ensuite et on enferme le grain sèchement, avec l'attention de le garantir des rats et des souris qui en sont friands. Ce grain se conserve bon deux années sur terre; à la troisième, il n'en lève guère[1].
Quelques particuliers en font sécher en vert pour manger pendant le carême' et voici la manière. On les prend à une bonne grosseur ; on leur ôte leur robe ; on les enfile en chapelets et on les met premièrement à l'ombre pendant quelques jours ; ensuite on les expose au soleil jusqu'à ce qu'elles soient bien sèches, et on les enferme dans un lieu sec ; mais, à les bien apprécier, c'est un mauvais manger qui se réduit en bouillie, et qui est plus dégoûtant qu'appétissant.
Un auteur a avancé que, pour bien fumer une terre, il fallait la semer en fèves, et labourer avec toute la plante, qu'on enterrait bien quand elle commençait à fleurir, et que cet amendement était préférable à tous les fumiers : je n e connais personne qui en ait fait l'épreuve, je ne saurais par conséquent ni l'approuver, ni la rejeter ; mais je sais, pour en avoir été témoin a souvent, que, dans le royaume de Naples, beaucoup de particuliers fument leurs terres avec une plante à peu près semblable, dont je n'ai pas retenu le nom, qu'ils laissent croître fort haut, et qu'ils enterrent de même : d'où je présume que cette sorte de fumure pourrait être bonne ; mais il faut calculer si elle serait plus d'économie que le fumier ; car on perd la récolte d'une année, la semence et les frais de deux labours : cependant, dans les pays où on ne peut pas trouver de fumier, peut-être cette pratique serait-elle bonne et utile.
[1] Il ne faut écosser les graines qu'au moment où on les sème ; elles se gardent beaucoup mieux dans leurs gousses placées dans un lieu sec et obscur. La fève, par exemple, conserve par ce moyen sa vertu germinative pendant cinq ou six ans.
La fève, originaire d'Égypte, est sensible au froid à peu près au même degré que les pois ; on en possède plusieurs variétés, les unes à haute tige, les autres tout à fait naines. Les fèves à haute tige sont peu cultivées dans les jardins maraîchers ; on les cultive en grand en plein champ pour les approvisionnements maritimes. On cultive principalement dans les potagers, parmi les espèces jardinières de grande taille, la fève de marais et la fève de Windsor, espèce anglaise dont le grain reste vert quand il est complètement mûr. Parmi le s variétés naines, la fève julienne, précoce et de très bonne qualité, est celle qui convient le mieux à la culture maraîchère.
On sème les fèves en place dès la fin de février à bonne exposition ; on met deux fèves dans chaque trou, en espaçant les touffes à 30 centimètres, dans les lignes espacées entre elles de 50 centimètres pour les grandes espèces, et de 40 pour les naines. Quand les plantes ont environ 1 décimètre de haut, elles sont binées avec soin et légèrement buttées. Plus tard, si la mauvaise herbe les envahit, on les sarcle une fois ou deux puis, au moment de la pleine floraison, on supprime toutes les sommités fleuries, ce qui favorise la formation des fèves dans les cosses inférieures, les seules qui soient fertiles
On peut, pour hâter la récolte des fèves, les semer en pépinière, soit sous cloche, soit à l'air libre, au pied d'un mur au midi, dès la fin de janvier elles ne tardent pas à lever, et donnent du plant assez délicat qui périrait si, chaque fois qu'il gèle, il n'était abrité sous une couverture de litière longue ; on découvre les fèves lorsqu'il cesse de geler. Après la fin des grands froids, vers le 15 février, si la température le permet, les fèves sont transplantées à demeure, deux à deux, en observant les mêmes distances que pour les semis en place. On gagne par ce procédé huit à dix jours sur la marche naturelle de la végétation des fèves semées en place à l'air, libre. La fève à pour ennemi le puceron noir, qui l'envahit pour ainsi dire instantanément, suce les tiges et les feuilles et fait périr la plante. Quand on s'en aperçoit à temps, et que l'espace infesté de pucerons noirs n'est pas trop étendu, on peut arrêter leur multiplication désastreuse en arrosant les fèves avec une forte infusion de tabac à fumer dit de caporal. On verse l'eau bouillante sur le tabac, à raison de 60 grammes de tabac pour 10 litres d'eau ; on se sert de l'infusion pour en arroser les fèves dès qu'elle est complètement refroidie. Le jardinier maraîcher ne laisse pas mûrir la fève; elle est récoltée verte et vendue comme légume frais. Une expérience curieuse, que chacun peut vérifier, consiste à couper au niveau du sol les tiges des fèves d'espèces précoces aussitôt après la récolte des cosses vertes ; la souche émet aussitôt de nouvelles tiges qui fleurissent et portent fruit avant la fin de l'automne. Quand les fèves sont environ à la moitié de la hauteur normale de leur espèce, on plante dans les intervalles des lignes des choux de Milan ou de Bruxelles, ou bien on y sème des carottes ; dès que la récolte des fèves est enlevée, le terrain se trouve occupé par une autre culture, et il n'y a pas de temps perdu, sans que le produit des fèves en grains frais en soit diminué.
Les fèves de marais et les lentilles dont on veut réserver les produits pour les semis de l'année suivante doivent être gouvernés comme les pois et les haricots. Les graines de toutes les plantes potagères de la famille des légumineuses peuvent conserver pendant plusieurs années leurs facultés germinatives ; mais on obtient de meilleurs résultats en ne semant que les produits de la récolte précédente, conservés dans les cosses jusqu'au moment de les semer.
Synonymies vulgaires, Fave, Favelole, Gourgane anglaise, Bean ; allemande, Gartenbohne ou Puffbohne.
Plante annuelle, originaire de la Perse.
On sème les premières Fèves en janvier, sous panneaux ; en février on les repique, sur une costière exposée au midi, en rayons un peu profonds, qu'on trace à 35 centimètres les uns des autres. On les couvre de litière .pendant les mauvais temps, et, lorsqu'elles ont quelques centimètres de hauteur, on donne un binage ; puis on achève de remplir les rayons, ce qui augmente la vigueur des plantes et leurs produits. Lorsqu'elles sont défleuries, on pince toutes les extrémités, afin de forcer la sève à se porter vers le fruit. Pour les semis de janvier, on prend de préférence la Fève naine hâtive, qui, traitée comme nous venons de l'indiquer, peut être récoltée (pour être mangée en vert) dès le mois de mai, car alors on cueille les gousses lorsqu'elles ont atteint à peu près le quart de leur grosseur. On peut aussi cultiver les Fèves sous panneaux, mais elles produisent peu et sont presque toujours attaquées par un puceron dont il est difficile de les débarrasser.
Dans les environs de Paris, et particulièrement à Fontenay-aux-Roses, on cultive les Fèves juliennes, les Fèves de marais, les Fèves de Windsor, les Fèves vertes. On les sème, en février et mars, par touffes ou en rayons, et à partir de cette époque les semis peuvent être continués successivement jusqu'à la fin de mai. Il faut environ trois litres de semences par are. D'ailleurs, quelle que soit l'époque des semis, les soins consistent à donner quelques binages et à pincer l'extrémité des tiges, comme nous l'avons précédemment indiqué.
La Fève se contente de tout terrain, mais elle préfère un sol frais, bien fumé, non exposé au plein soleil. On la sème en février, en mars et en avril, en lignes, ou par touffes en mettant 3 ou 4 graines dans chacun des trous, espacés d'environ 30 à 35 cm ; au second binage on les rechausse pour les fortifier ; dès que la fleur est passée, il faut pincer l'extrémité de la tige et des branches afin de hâter la formation des cosses inférieures. Si l'on enlève la fève au quart ou à la moitié de son volume normal, on coupe les tiges au niveau du sol, on les défend contre la sécheresse et, de cette manière, on obtient une seconde récolte en automne. Parmi les principales variétés, citons : la fève des marais, originaire de la Perse ; la grosse fève ordinaire, la fève de Windsor, déforme arrondie ; la naine hâtive ; la Julienne; la naine rouge, la plus hâtive et la plus naine de toutes ; la F. verte tardive, race très productive, originaire de la Chine ; la F. à longue cosse, hâtive et bien fournie. Les Fèves gardées dans leurs cosses conservent leurs facultés germinatives plus de cinq ans.
C’est un légume très apprécié dans les jardins du propriétaire comme dans ceux de la ferme. Le propriétaire recherche les fèves petites et délicates ; le fermier, les grosses variétés.
Les meilleures à cultiver pour tous sont :
Fèves de marais. – Tige grande, grain gros, très productive. C’est la fève par excellence pour la culture et les potagers agricoles pour les climats du Nord. Semer de février à avril.
Fèves de Séville. – Tiges de la même taille que la précédente ; grains un peu plus petits, mais beaucoup plus abondants ; cosses d’une longueur prodigieuse. Très bonne qualité, des plus productives, précieuse pour l’Ouest, le Centre et le Midi de la France pour les jardins. On sème en février et mars.
Fèves naines à châssis. – La plus petite de toutes ; tiges des plus petites et grains petits, excellents à consommer en robes. On avait renoncé à la culture des fèves sous châssis parce qu’elles étaient attaquées avec une telle fureur par les pucerons que, non seulement on perdait les fèves, mais encore où empoisonnait toutes les autres cultures de pucerons. Aujourd’hui, cet inconvénient n’est plus à redouter, grâce à l’emploi de la poudre foudroyante et du liquide concentré Rozeau. (Voir aux chapitres : Destruction des insectes et Renseignements.) Cette nouvelle découverte nous permet de cultiver les fèves sous châssis sans le moindre inconvénient. C’est une ressource de retrouvée, à une époque où les légumes frais sont encore assez rares.
Fèves naine verte de Beck. – Charmante variété de fèves naines, des plus fertiles et de qualité hors ligne. Excellentes pour manger en robes ; grains petits et très abondants. Semer en février, mars, avril, mai, et même juin. La fève naine de Berck réussit parfaitement sous châssis.
Culture sous châssis, deux variétés à employer : la fève à châssis ou la fève naine de Beck. On sème sous châssis en janvier et février, pour mettre en place sur couche tiède et sous châssis ou sous cloches en mars. On donne de l’air toutes les fois que la température le permet, et on couvre la nuit. Aussitôt que les fèves sont bien fleuries, on pince l’extrémité de la tige, afin de concentrer l’action de la sève sur les fruits et d’accélérer leur maturation.
Les fèves de marais et de Séville se sèment en poquets distants de 30 centimètres environ. On met trois ou quatre graines dans chaque, et on recouvre aussitôt. Des binages sont nécessaires pour maintenir le sol meuble et détruire les mauvaises herbes : on les donne plus ou moins fréquents, suivant la propreté de la terre, et aussi l’élévation de la température. Lorsque les fèves sont en pleines fleurs, on pince l’extrémité de la tige pour arrêter la végétation et faire mûrir les fruits plus vite. Les fèves doivent être semées dans les carrés C et D du potager.
Quand on veut obtenir des fèves de très bonne heure, avec les fèves de marais et celles de Séville, on sème sous châssis, pour mettre en place, en pleine terre, dans Les premiers jours de mars. On dispose, dans le carré D, une planche dans laquelle on trace des sillons distants de 35 à 40 centimètres, et profonds de 15 centimètres environ. On repique les fèves en quinconce dans les sillons à la distance de 25 centimètres. On couvre la nuit avec de la litière, quand on redoute la gelée. Lorsque le plant est bien repris et qu’il a un peu poussé, on donne un binage énergique, et l’on remplit les sillons ; les pieds ainsi rechaussés acquièrent une plus grande vigueur. On peut semer quelques radis très clair, en contre-plantation, en donnant le binage, et on les arrache aussitôt bons à consommer. On arrose assez copieusement et, dès que les fèves fleurissent, on pince l’extrémité de la tige pour concentrer toute l’action de la sève sur les fruits qui se forment à la base.
Si ces fèves sont récoltées en robe, c’est-à-dire lorsqu’elles sont au quart de leur grosseur, aussitôt la récolte faite on les coupe au pied, on fume en couverture avec du fumier très consommé et l’on arrose copieusement pendant cinq ou six jours, pour faire repousser des jets, qui donneront encore une récolte ; mais, pour obtenir ce résultat il faut avoir cueilli les fèves de très bonne heure, toutes ensemble, et au quart de leur grosseur ; quand on les laisse trop longtemps, les pieds ne repoussent plus. On sème les fèves naines de Beck en pleine terre de février à septembre, dans le carré C, en lignes distantes de 30 centimètres. On ouvre des sillons profonds de 10 centimètres environ avec le rayonneur ; l’on y plante une fève tous les 40 centimètres, et l’on recouvre. Il est urgent de biner aussitôt les fèves levées et une ou deux fois avant qu’elles aient atteint une certaine hauteur, pour maintenir la terre meuble et détruire les mauvaises herbes.
Le pincement n’est pas urgent pour la fève de Beck dont la hauteur n’excède pas 30 centimètres. Cependant, quand on le pratique sur l’extrémité de la tige, les grains se forment et mûrissent plus vite. Malgré tous les soins apportés à la récolte des graines, il existe toujours dans les semis quelques pieds ayant tendance à grandir. Il faut les arracher aussitôt qu’ils s’élèvent au-dessus des autres.
Pour les fèves en robe, à manger vertes, rien ne peut remplacer la fève naine de Beck, comme fertilité, comme petitesse et surtout comme qualité. Quand on veut obtenir des fèves de très bonne heure sur les grosses variétés, on les pince sur cinq étages de cosses seulement. Les grains se forment très vite ; on les cueille petits pour manger en robe, et on coupe le pied rez le sol aussitôt. Par ce moyen, on obtient une récolte très hâtive, et une tardive. Pour récolter de bonnes graines, on fait un semis spécial dans le carré D. Aussitôt les cosses formées, on pince la lige ; on choisit les plus belles siliques et l’on supprime toutes les autres. Les fèves semées en pleine terre sont souvent attaquées par le puceron. (Voir à la septième partie, chapitre V, Insectes, pour les détruire.)
Quoique les fèves soient beaucoup moins importantes au point de vue alimentaire que les haricots et les pois, elles sont néanmoins très cultivées. On les reproduit de semis qu'on fait en place au commencement de mars, de préférence dans un terrain abondamment fumé, en rayons espacés de 35 à 40 centimètres. Quand les plants ont atteint une quinzaine de centimètres, on pratique un léger binage ; à l'époque de la floraison, on coupe l'extrémité de la tige, dans le but de faire développer plus rapidement les fruits. Les binages se répéteront de temps en temps; les arrosages ne sont même pas nécessaires dans la plupart des cas.
Lorsqu'on cultive sous châssis, on sème à partir du mois de janvier ; puis, au bout d'un mois, on repique en place, en pleine terre, sur une planche bien exposée. On peut encore cultiver les fèves en hiver en semant à la fin de l'automne et en protégeant les pieds à l'aide de châssis ou de paillassons supportés par des baguettes, mais cette manière de faire n'est guère usitée que dans le Midi, où les hivers ne sont pas très rigoureux.
Les variétés de fèves les plus cultivées sont :
La fève de marais, très répandue aux environs de Paris ;
La fève de Windsor, plus tardive que la précédente, mais plus productive ;
La fève de Séville, hâtive, dont les cosses sont en général plus longues que dans les autres variétés ;
La fève d'Aguadulce, variété hâtive dont la cosse peut atteindre jusqu'à 35 centimètres de longueur;
La fève Julienne, précoce et assez estimée, malgré la petitesse de ses graines ;
La fève naine hâtive à châssis, qui, en raison de sa petite taille, convient bien à la culture forcée ; cultivée en pleine terre, elle donne aussi de fort beaux produits ;
La fève naine verte de Beck, encore moins élevée que la précédente, mais tout aussi précoce.
Les fèves subissent les atteintes de la bruche que nous avons signalée précédemment, et parfois aussi d'un puceron qui vit sur l'extrémité des tiges. Le pincement qu'on pratique surtout pour faire grossir les fruits a aussi l'avantage d'arrêter les ravages de ce puceron.